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Les défis actuels de l’upcycling textile

L’upcycling est devenu une tendance majeure dans l’industrie de la mode, favorisée par un souci croissant de durabilité et une sensibilisation croissante aux principes de l’économie circulaire. Cette tendance a été accentuée par la pandémie de COVID-19. Dès novembre 2020, l’influent magazine Vogue a annoncé que « l’upcycling était la plus grande tendance mode du moment »[1].

Par rapport au recyclage traditionnel, qui détruit un produit pour en créer un nouveau de même ou moindre valeur, l’upcycling va plus loin, en revalorisant les produits (considérés comme résidus ou « déchets »), en les transformant en articles de meilleure qualité, grâce notamment à la créativité.

Avec le recul de quelques années de pratique, qu’en est-il actuellement ?

Un exemple très parlant est sans doute l’expérience de RESAP. Créée en mars 2020, en France, l’entreprise était active en B2C (vêtements et accessoires) et B2B (organisation d’ateliers d’upcycling en entreprise). En moins de 4 ans, RESAP a réussi à être distribué aux Galeries Lafayette, a collaboré avec plusieurs grandes marques, disposait d’un point de vente de 100m² en plein Paris, était suivi par 60.000 personnes sur les réseaux sociaux, et disposait d’une équipe de 7 personnes à temps plein…

Malgré le soutien de la communauté et sa passion pour la mode durable, la fondatrice Mona Boujtita a dû mettre fin à l’activité : RESAP a dû arrêter ses activités en mars 2024. La mode durable connaît en effet des réalités difficiles  : les coûts de production et de gestion sont généralement élevés, ce qui, combiné à la complexité de la gestion des stocks, des opérations et de la logistique, rend la rentabilité difficile à atteindre. Enfin, il semble que la concurrence accrue (notamment de la fast fashion) et les attentes élevées des consommateurs représentent également des défis majeurs pour les entreprises de ce secteur.

Des études récentes démontrent également que le potentiel de pérennité des entreprises d’upcycling ne soit pas garanti, si cette activité n’est pas couplée avec une autre activité réellement rémunératrice. Cette diversification peut prendre la forme d’ateliers, de vente de vêtements de seconde main, de location de vêtements ou de matériel de couture,…

L’upcycling est vertueux d’un point de vue environnemental, voire social, mais semble donc poser de sérieux défis en termes de rentabilité économique.

Malgré ces limites et ces expériences d’échec, plusieurs facteurs de succès pourraient contribuer à renforcer le potentiel de l’upcycling. Ainsi, par exemple, des réglementations plus strictes au niveau européen stimulent de plus en plus les idées circulaires dans le secteur textile. À partir de 2025, tous les pays européens devront organiser un système de collecte séparée des textiles. Cela devrait entraîner une offre importante de services de réutilisation et de réparation économiquement rentables.

Il est également possible que les pouvoirs publics prennent leur part de responsabilité, en menant des actions de sensibilisation, en mettant en place des incitants financiers (par ex. baisse de la TVA sur les articles upcyclés), ou en mettant en avant des initiatives dans ce domaine. Les activités d’upcycling sont encore actuellement fortement subsidiées, mais cela s’explique également par le fait qu’elles sont souvent exercées dans un cadre social et/ou formatif (par ex. collaboration avec les CPAS), ou en entreprise de travail adapté.

Alors l’upcycling deviendra-t-il l’un des piliers essentiels de l’économie circulaire, à l’instar de son grand frère le recyclage ? Quoi qu’il en soit, et malgré les difficultés que peut connaître le secteur, nous avons tout intérêt à voir cette tendance continuer de grandir pour faciliter la transition écologique…

[1] https://www.vogue.co.uk/fashion/article/upcycling-trend-ss21